Invités d'honneur 2014

Comme en musique, il existe des airs guerriers et triomphants et des mélodies douces et enivrantes, en art il y a des artistes qui abondent de nuances et pour qui chaque œuvre est le témoignage d'une richesse débordante d'un état d'âme particulier.

Il en est de même pour Michel Sementzeff qui, dans ses toiles nous confie ses sentiments, il se laisse envahir par une ambiance intérieure qui l'emportera vers des horizons lointains tout en l'enivrant dans des effluves douces et colorées. Cet artiste poète de la peinture nous entraîne dans un monde irréel qui se nourrit du quotidien, mais qu'il transpose dans une autre période en noyant les éléments dans la brume des souvenirs.

 

Ce qui est tout de suite remarquable chez cet artiste c'est à quel point, avec quelle évidence il fait parler ses personnages. Leur expression est la clef de voûte de sa construction, c'est le langage des traits et de la mouvance des formes du visage qui vont être à la base de son tableau. Mais sa démarche va bien plus loin encore. Par exemple dans son personnage tenant le bâton de bois sur lequel sont fixés les fils qui vont animer et donner vie à une marionnette, l'artiste théâtral et manipulateur qui en réalité est la véritable âme de la poupée, ne marque aucune expression sur son visage, afin que tout le langage vienne uniquement de la petite marionnette à qui il va donner vie et mouvement. Par contre pour le mime qu'il nous présente, il opposera l'habit d'arlequin et les masques de carton d'un visage triste qui gisent inertes et sans expression tout autour traînant leur allure d'abandon de tout personnage. 
Ici encore point n'est besoin de l'appui d'un texte pour exprimer l'expression intérieure. Les clowns comme les mimes ou encore les dizaines de visage masqués du Carnaval vont faire partie d'un de ces domaines pour lequel croissent les difficultés picturales, Michel Sementzeff voulant opposer le moment grave qui s'exprime délicatement caché sous la légèreté d'un voile.   

Fort de ces expériences, la pratique le conduira à mettre toujours l'expression intérieure sur les traits et dans l'éclat des visages, lesquels vont devenir  de plus en plus expressifs.

Cette démarche, l'artiste va la développer et l'étendre aux natures mortes et aux paysages. Michel Sémentzeff jouera par les couleurs et par leurs reflets afin de créer une ambiance à l'intérieur de laquelle il construit une composition de couleurs qui vont habiller les agréments de la vie. Ici des vases, des pots, là, des fleurs et des objets de toutes natures. Cependant là où la transposition du message devient la plus forte, c'est dans la composition et l'atmosphère des paysages. La nature, elle, suit le cours de la vie tandis que les saisons expriment les humeurs des vents et du soleil, la neige elle-même par sa disposition introduit des variétés qui vont subir les évolutions du temps, évoluer et s'étirer tout le long de la journée,  le rayon de soleil transformant en un instant les milliers d'éclats de lumière égarés sur les cristaux de neige en autant de diamants, avant de faire reluire les jeunes feuilles vertes au printemps.     

 

En réalité, Michel Sementzeff agit comme un chef d'orchestre, il transmet un état d'âme, une humeur par l'ambiance de son tableau dans lequel les formes comme les couleurs et leurs accords vont mieux que tout discours témoigner de ses états d'âme du moment.
                                                                                                            Texte de Christian GERMAK

 

H.L Bergey est sculpteur et poète. Plasticien talentueux, il explore sans retenue la malléabilité des mots et de la matière. Il s'est inventé un monde, un lieu situé à la frontière du grès et du métal.
"La représentation de mes sculptures s'apparente à une histoire humaine.
L'allégorie du corps humain, sa posture et sa tenue représentent la vie, ce qu'il est, ce qu'il deviendra.
J'oppose volontairement un visage figuratif à un corps abstrait.
Un mouvement suggéré révèle plus à notre imaginaire que tout discours sur l'humanité.
Le cerveau de la personne qui regarde la sculpture construit le reste au rythme de ses émotions, parce qu'un livre ou une sculpture est le lieu où se construit, se concrétise et se conserve la pensée.
C'est-à-dire, tout ensemble, la raison, la mémoire, le rêve et l'imaginaire.
Je laisse libre de voir ou de ne pas voir, la souffrance reste subjective, le plaisir aussi.
   
 

L'argile ou plus précisément le grès, est la matière que j'affectionne le plus.
L'argile est malléable, influençable, c'est un matériau qui véhicule la transmission.
Elle enregistre et nous retransmet à l'infini, l'émotion emmagasinée.

Ma démarche, depuis de longues années a été de comprendre l'argile, de l'employer comme véhicule de mes pensées. Nous nous sommes mutuellement apprivoisés, nous faisons un bout de chemin ensemble sans maître apparent ni contrainte.
La transmission du savoir réciproque, donnant, donnant...
 



 

 

Très vite je me suis inventé un monde, une île située à la frontière de la terre et du métal.
Elle est née d'un mouvement tellurique dans la mer Tyrrhénienne. Elle se nomme l'île Tellure, mes personnages en grès Telluréen et Telluréenne survivent au contact de l'argile et de mes mains.
L'argile a su transmettre jusqu'à moi, l'épouvantable souffrance de ce peuple.
Mes recherches sur les oxydes et les cuissons au gaz pour élaborer une patine proche de la rouille m'ont rapproché naturellement du métal au point d'associer le grès et le métal.
La rouille a une couleur étonnante à mes yeux, vivante et évolutive, et renferme un autre concept du temps."
                                                                                                                                         H.L. BERGEY